jeudi 7 février 2008

Ste Eugénie (ben décidément, la dernière fois c'était la Ste Delphine)

Au troisième, dans mon HLM, y'a l'espèce de connasse, celle qui bosse dans la pub

Bonjour lecteur, comment ça va pour toi?

Parce que pour moi, oh oui pour moi, ça va pas mais pas mais pas du tout.
Comme je vous l'annonçais précédemment, la joyeuse et respectueuse agence pour laquelle je devais travailler m'a lâchement fait faux bond, m'obligeant à recommencer mes recherches. A mon grand étonnement, j'ai obtenu un nouvel entretien plus vite que prévu puisque ce matin-même (enfin matin en agence de pub, 11h quoi), je me suis rendue dans une agence où j'avais déjà passé un entretien il y a presque deux ans. J'étais alors en team et les deux gentils monsieurs qui nous avaient reçues avaient jugé notre dossier intéressant en terme d'idées mais encore un peu trop junior à leurs yeux d'un point de vue graphisme. La fin de l'entretien avait été occupée par une multitude de conseils précieux et bienveillants que nous avions d'ailleurs suivis.

Ce matin, j'étais bien décidée à tout déchirer pour obtenir ce poste vraiment intéressant et épanouissant. J'étais tellement stressée que je me suis levée d'une traite après une nuit blanche d'insomnie insurmontable au cours de laquelle j'ai compté les moutons (référence à l'agence.. ouai enfin là faut comprendre).

Je suis donc arrivée avec 45 minutes d'avance, record encore jamais ne serait-ce qu'effleuré et ai pu me promener dans les petites rues de Boulogne à la recherche d'un moyen de me déstresser et de couper mon envie psychologique de faire pipi.

J'ai finalement pénétré dans ce grand immeuble de verre vers 10h45 et me suis retrouvée devant un accueil vide qui m'a invitée à me diriger seule vers les ascenseurs malheureusement détenteurs d'un code d'accès aux étages. Je suis ressortie à la recherche d'une âme, ai ouvert toutes les portes espérant y trouver une aide mais 2 minutes (en paraissant 15) plus tard, une femme est sortie d'une porte dérobée et m'a indiqué le dernier ascenseur comme libre d'accès.

Arrivée au troisième étage, je m'annonce à l'accueil auprès d'une fille très souriante qui me donne encore davantage envie d'y rester pour toujours. J'ai pu attendre 5 minutes en compagnie d'un mouton à taille humaine et une multitude de pensées. Bizarrement, les sujets qui occupaient mon esprit n'étaient absolument pas les phrases choc à dire (genre phrases choc), mais plutôt un éternel mystère sur cette moquette rouge. Etait-elle déjà là il y a deux ans? Ca ne me dit rien et en même temps pourquoi l'auraient-ils changé? Ouai mais rouge comme ça je m'en serais rappelée.. Avais-je vraiment attendu dans ce même couloir?

Mes questions ont été interrompues par l'arrivée de monsieur Z qui a tout de suite utilisé le ton amical et "pas prise de tête". Nous avons pris l'ascenseur après qu'il m'ait expliqué qu'il n'était qu'un gros flemmard, incapable de monter un étage à pieds. Me sentant en confiance, je lui raconte ma mésaventure de l'ascenseur à code et au fur et à mesure que je parle, je me rappelle que je suis tout de même avec mon peut-être futur employeur et me recentre machinalement sur cette moquette rouge pour être sûre de ne pas lui poser la question. Et, à peine un pied au 4ème étage, il me regarde et me dit "T'as vu, on a changé la moquette, maintenant c'est rouge".

Arrivés dans son bureau, il devient encore plus amical et me parle très gentiment, nous discutons un peu de ma vie durant ces deux années et la suite logique veut que je lui présente à ce moment précis mon dossier avec mes créas réalisées. Mais avant d'ouvrir le book, il m'annonce qu'il préfère être d'emblée honnête avec moi et que le poste pour lequel je suis en ce moment-même en train de passer l'entretien, est tout simplement déjà pourvu. Un flot de larmes m'envahit en un court instant mais je me retiens au maximum pour finir d'écouter ses explications comme quoi il a quand même souhaité me revoir pour constater l'évolution de mes créas et, sait-on jamais, il pourrait un jour avoir à nouveau besoin d'un concepteur-rédacteur.

L'entretien s'est fini dans la même ambiance, qui a cependant été un peu ternie par ses critiques plus ou moins bonnes, plutôt moins d'ailleurs. Il a reproché à mon dossier d'être dans son ensemble trop "scolaire" et pas assez différent de tous ceux qu'il voit. Et, malheureusement pour moi, il avait une très bonne mémoire, au point qu'il s'est rappelé avoir déjà vu la plupart des pages dans ce même dossier, deux ans auparavant.

Nous avons encore un peu discuté mais j'essayais d'accélérer les dernières futilités qu'il disait pour être sympa car avait peur d'avoir été méchant, il s'en excusait et devait sentir qu'il m'avait touchée. Mais la boule dans ma gorge grossissait à vue d'oeil et je priais pour qu'il ne remarque pas que je le distinguais derrière une épaisse buée.

J'ai finalement promis de le tenir informé de ce qui suivrait et me suis effondrée une fois le pied posé dehors. C'était d'une part la déception de ne pas avoir cet emploi, ajouté aux critiques que j'ai encaissée, tout ça agrémenté d'une fatigue terrible, me mettant encore plus à fleur de peau que d'habitude.

Une fois rentrée chez moi, il s'est passé une des situations que je déteste le plus, j'ai reçu un email d'un ancien élève de ma classe qui me demande si c'est bien moi qu'il a vue ce matin en train de passer un entretien. Il faut savoir que dans la pub, ça se la raconte à mort, et bizarrement, ceux qui en font le plus sont souvent les junior, voire les stagiaires. Il faut savoir aussi que quoi qu'un créa du même niveau que toi dise ou fasse, c'est fourbe, s'il regarde une de tes idées, il te dira à coup sûr que c'est "déjà vu" ou "facile", s'il te demande où tu en es dans tes recherches, c'est qu'il a déjà un emploi et attend simplement de pouvoir te le dire fièrement.

Le garçon qui m'a envoyé l'email n'est pas foncièrement mauvais mais d'une part c'est lui qui a obtenu le poste pour lequel je postulais et d'autre part c'est un vrai créa, et la simple lecture des quelques mots de son message a suffi pour m'enerver: "Est-ce bien toi que j'ai vue avec mon DC?". Ouai, parce que dans la pub on ne dit jamais un directeur de création, c'est pas assez cool et bien trop long. Et encore, le DC a de la chance, ce n'est rien à côté du directeur artistique qui se transforme en AD, abréviation de art director, parce qu'on est dans la pub, alors on parle anglais.

C'est triste parce que j'aime ce métier mais je gerbe cette créa-attitude que j'espère ne jamais avoir. Il m'arrive de dire AD je l'admets mais jamais je ne viendrai décoiffée volontairement et ne parlerai en me tortillant les cheveux dans tous les sens pour avoir l'air encore plus branchée..

Malheureusement je sais que le monde de la pub est petit et que le nombre de grandes agences n'est pas élevé, je serai donc inévitablement amenée à recroiser et me reconfronter à des têtes connues, si un jour j'ai la chance d'être embauchée dans une vraie agence.

Je repasse un appel, embauchez moi et une fois que c'est dit, ne changez pas d'avis ! Et, si vous changez d'avis, dites le moi.. Est-ce si compliqué ?